Géronimots XXI

samedi 31 janvier 2015

A LA RECHERCHE DU TAMPON PERDU

                            
                                                         


 Et soudain je revis ce moment où, j'allais peut-être sur mes treize ans, j'étais tout nu dans la salle de bain de maman, à farfouiller, vaguement excité, dans ses boîtes de médocs et de maquillage, quand j'avisai sur le carrelage un objet inconnu où d'abord je crus voir une cigarette (or maman n'avait jamais fumé), prolongée d'un bout de ficelle ... Ou bien serait-ce, me disais-je effaré, la reproduction très agrandie d'un spermatozoïde, comme j'en avais vu l'image dans un gros dico de mon paternel, où ce que j'avais pris pour une une ficelle était le flagelle? Et dans une illumination, en cet objet que je venais d'étiqueter de la sorte, je crus reconnaître le spermatozoïde même dont j'étais issu, qui avait fécondé l'oeuf maternel, m'interrogeant s'il ne valait pas mieux l'écrabouiller ou le déchiqueter, avec des gants, et faire disparaître les débris blanchâtres dans le lavabo, en déversant dessus une cataracte, et tant pis si par un effet fatal de cette dilacération j'allais moi aussi disparaître et m'anéantir, ne laissant de ma personne que ces fins gants de latex qui, tombés sur le carrelage, attesteraient le crime dont j'avais été l'auteur, et la victime, quitte à ce que maman, pour ne pas m'oublier, eût désormais à les porter toujours, jusqu'à l'heure de sa mort où elle les mordrait douloureusement en poussant son dernier souffle.

vendredi 30 janvier 2015

CAFARMACIE



CAFARMACIE : Officine entièrement dédiée à un certain Gregor Samsa.

Gregor, quoique fort myope, collé aux carreaux sales de sa chambre apercevait confusément de l'autre côté de la rue le clignotement vert de l'enseigne, bien reconnaissable, de la cafarmacie. Les rayonnages devaient être envahis jusqu'à presque en crouler par les centaines et les centaines de spécialités conçues expressément pour son cas. S'il réussissait à s'y traîner, on l'y recevrait à bras ouverts, sans doute le laisserait-on picorer à sa guise parmi les substances, avaler les comprimés, engloutir les sirops et autres liquides régénérants, et même se piquer en enfonçant son abdomen dans l'aiguille des seringues ! Nul doute que par l'ingestion, même au petit bonheur, de tant et tant de médecines, il serait sauvé, ou alors, tout au contraire, le personnel en blouse blanche aurait bientôt le chagrin de voir ses fonctions vitales ralentir, mais pour peu que la poubelle de la cafarmacie ne soit qu'à moitié pleine, il saurait bien se traîner jusqu'à ce réceptacle idéal, s'y enfourner tout entier, s'enfoncer dans le cartonnage des boîtes vides, parmi les notices indiquant les effets et les posologies, et dans le bruit, s'apaisant par degrés, de ces froissements, peut-être aurait-il quelques légers spasmes juste avant de s'endormir dans ce berceau de papier.

jeudi 29 janvier 2015

OLYMPISME

                                                                           

Enserré dans la minutie de ses règlements, l'olympisme  peut néanmoins nous réserver des écarts surprenants. La plus spectaculaire  épreuve des J.O : le saut à la perche, fut longtemps dominée par l'Ukrainien Sergueï Bubka, le premier à franchir le seuil mythique des 6 mètres, avant d'être détrôné par le Français Lavillenie, avec un saut de 6,16 mètres. Un grand bravo à ces superchampions, dont nous voudrions pourtant relativiser les records, voire rabattre leur caquet en évoquant l'exploit réalisé à l'entraînement, aux J.O. d'Athènes de 2004, par un certain Dominikos Theotokopoulos, obscur perchiste grec ... Le document que nous sommes heureux de produire a bien évidemment été censuré par le CIO de l'époque, dont la vertu n'était pas sans faille. Dominikos, donc, l'athlète de loin le moins connu de la délégation grecque, prit son élan, on remarqua aussitôt son style peu orthodoxe, voire franchement aberrant, mais compensé par une fabuleuse vitesse car, paraît-il, parvenu aux 40 mètres de sa course littéralement il fusait, et voici que cette vélocité quasi-surnaturelle fut soudain convertie par l'athlète, ou plutôt : l'artiste, en la plus spectaculaire des ascensions puisque, sans effort, prenant à peine appui sur sa perche, ou plutôt sur ce long bâton curieusement orné d'une oriflamme blanche qui lui en tenait lieu (comme s'il ne concourait plus sous les couleurs de sa patrie?), il s'enleva, franchit la barre en se jouant et, car ce n'est pas tout, loin qu'il retombât de l'autre côté, la sidération fut générale à voir le svelte et longiligne Dominikos persévérer tranquillement dans son ascension, sous les regards moins admiratifs qu'incrédules des quelques  perchistes présents sur le tarmac, pour ne pas dire écoeurés, dégoûtés de cette facilité plus qu'humaine, au point de se voiler la face ou de tomber à la renverse, comme l'atteste notre document. Puis, de Dominikos, il ne fut plus nouvelle, nul n'ayant pu faire état de son retour dans les stades ni sur les sols. Honorée d'aucune médaille, non conforme aux règlements, non homologuée, sa prouesse n'était promise qu'à l'oubli si par miracle une main n'eût sorti d'un tiroir cette image vouée à l'immortaliser.






mercredi 28 janvier 2015

GOMORRA

                                     

 Nul besoin d’être atteint de proustofolie furieuse pour reconnaître,  vue par ses yeux écarquillés, la fameuse scène où vicieusement embusqué derrière un talus le jeune Marcel se repaît des tendres ébats de cette demoiselle et de sa bonne amie, affublée d’une perruque blonde, qui ont oublié, comme par hasard, de fermer les volets de l'amoureuse alcôve … Mais voici que la brunette, attaquée avec fougue par la blondasse, vient de tourner la tête, ayant repéré le voyeur, et elle s’interroge sur la suite des opérations : les deux amantes vont-elles chasser le vilain qui les épie ? Vont-elles, au contraire, stimulées par cette intrusion, redoubler d’ardeur et de ferveur ? Ou bien, plus vicieuses que le malheureux pervers, qui vient d'extirper son membre pour se l’astiquer en douce, nos deux amazones iront-elles jusqu'à se ruer sur le souffreteux petit jeune homme pour le traîner tout palpitant sur le canapé de crylor où le plier à leurs désirs ? Songeant déjà à faire de lui leur domestique, leur boy, vêtu d'une livrée dont rituellement il sera invité à se défaire,  de sorte à se retrouver tout nu à la réserve de son gilet à rayures jaunes, qui permettra à ses deux maîtresses de jouir, en esthètes, et du rapport des lignes et du contraste des couleurs par le fait des traînées rouges qui lui zèbreront les fesses quand, au motif d’une cruche cassée ou d’un rôti mal cuit, il lui en cuira sous les coups de cravache dont elles fouailleront à tour de rôle leur soumis, avant de le chasser, un jour, lasses de sa présence, lasses même de sa sujétion, et dégoûtées de le découvrir inapte si d’aventure, lui intimant de les prendre selon ce que veut la nature, d’abord la brune, ou la blonde, histoire de se changer les idées et de ne pas  mourir idiotes, il ne sait que baisser la tête en bredouillant un presque inaudible non possumus.











           

lundi 26 janvier 2015

LA CANNE


                                                           
(Irlande, mai 1969)
Ce couple de retraités, aux tailles si dissemblables, a-t-il été choisi par un magazine de "conso" pour tester deux modèle de cannes?  Toujours est-il que nous les voyons, monsieur et madame, arpenter de conserve une grève déserte, désolée, dénuée d'aucun attrait touristique, tout juste ponctuée d'une sèche et rase végétation. Mais la tenue oblique de sa canne, dans la main de la bonne dame, à l'allure très décidée, la tête caché sous son chapeau informe, est si peu orthodoxe qu'elle en a quelque chose d'inquiétant ... Plutôt qu'une canne dont étayer précautionneusement sa locomotion, ne dirait-on pas que, dénaturant cet ustensile, elle eût commencé d'y voir une manière de ... matraque, de "bidule", de casse-tête, peut-être en souvenir de certains événements, encore tout frais dans sa mémoire, survenus  un certain mois de mai? Nous aimerions croire que se retournant sans préavis elle ne s'apprête pas à la lever, ou tenter de la lever, vu son faible gabarit, sur le grand bonhomme qui, absorbé ou absent, marche derrière elle, dans l'idée folle de lui porter un coup fatal, avant que d'abandonner son grand corps sur la grève sauvage, déserte, où pourvu que nul fâcheux ne vienne déranger son repos il devrait finir par accéder à la condition de squelette, mais d'une telle dimension - comme si, pour le consoler de sa réduction à  cet état osseux, il lui eût été donné de croître allègrement? - qu'un jour lointain, un marcheur égaré le découvrant, il ne pourra que tomber en arrêt, perplexe, devant la démesure extravagante de ces ossements, et tourner lentement autour du plus gigantesque squelette, peut-être, qui fût jamais, après avoir machinalement ramassé la vieille canne, blanchie par les ans et les intempéries, telle un os surnuméraire, qui serait le sceptre d'un ancien pouvoir, et puis las d'un mystère qui passe son entendement nous verrons notre marcheur tourner les talons, et s'en aller en s'appuyant sur cette canne ou ce bâton qu'il tient fermement dans sa main.








dimanche 25 janvier 2015

WANTED




 Les meilleurs limiers de la PJ sont lancés aux trousses de cet homme, environ 35 ans , pourri de vices, grevé de dettes, extrêmement dangereux. Continuellement sous l'emprise du vin ou du haschich, le triste individu est possédé par l’idée du Mal dont avec des mots fleuris il s’est fait le propagandiste dans tous les quartiers de la capitale. Enragé pornographe, il se plaît à débiter d’horribles vers de son cru, si possible à la sortie des écoles : « La très chère était nue, et, connaissant mon cœur, / Elle n’avait gardé que ses bijoux sonores » - moins sonores que la voix éraillé du débauché qui n’aspire, nouveau Socrate, nouveau Diogène, qu’à corrompre la jeunesse. Il ne hante les églises que pour les profaner en troublant la prière par la profération de ses insanités comme, entre  cinquante blasphèmes, cet article de son catéchisme inversé : « C’est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !». Qu'il voit passer sur le trottoir un chaste troupeau de demoiselles, à l’ombre des cornettes des religieuses, vigiles de leur virginité, et le méchant de s'approcher et de leur prêcher, dans le sabir de ses alexandrins, les plaisirs hideux de Lesbos ! Monseigneur Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, en attendant l'incarcération de celui qui vingt fois par jour, à la vue de la pèlerine d'une hirondelle pédalant après lui, hurle "22 v'là les flics!", s'apprête à fulminer son excommunication majeure latae sententiae, comme ses prédécesseurs eurent à le faire avec la détestable engeance des comédiens  :  c’en est un, véritable histrion, pitoyable fleuron de la crapule soi-disant littéraire, et dont le vilain faciès, antithèse de la Face sublime de Notre Seigneur Jésus, ne fait monstration que des probants stigmates du déclin français.










samedi 24 janvier 2015

"IL A BLASPHÉMÉ ! "

                                                   

Ce monsieur tout de vert vêtu par Giotto, et déchirant théâtralement sa robe, c'est le Grand Prêtre Caïphe après qu'il s'est écrié, horrifié : "Il a blasphémé !", à propos du pauvre Jésus qui dans le roman évangélique (version Matthieu 26. 63-67), à ce même Caïphe lui demandant s'il était "le Christ, le Fils de Dieu", vient hardiment de répondre "Tu l'as dit" , et va le payer de sa vie - mais c'était, nous dit-on, dans un dessein eschatologique. Car, à suivre la légende chrétienne, le premier grand blasphémateur depuis quelque 2000 ans, ce serait soi-même le bon Jésus, revendiquant cet exorbitant statut de "Fils de Dieu", on ne peut plus hérétique pour la religion juive. Un Jésus qui est lui-même juif, quand les dessinateurs assassinés de Charlie, représentant l'irreprésentable Mahomet, et le caricaturant, n'étant pas musulmans ne pouvaient, de leur point de vue, blasphémer. Mais le fait est que le musulman moyen, standard, basique, si hostile soit-il au terrorisme, n'en est pas moins blessé, lui, par ces caricatures. Certes, le "blasphème", encore heureux, chez nous n'est pas un délit, mais un droit qui aujourd'hui, suite à l'abominable tuerie du 7, tendrait presque à devenir un devoir sacré aux yeux de la doxa charliste. La liberté d'expression, pourtant, ne devrait pas empêcher de mettre en balance le principe de plaisir  : blasphémons-nous les uns les autres, et celui de réalité : quel  rapport de force? quel risque à courir et faire courir? ; ou encore (Max Weber) l'éthique de conviction et l'éthique de responsabilité. Rien de plus drôle, si l'on veut, que le sous-titre de Charlie : "Journal irresponsable", et rien de plus dangereux. Depuis les caricatures néerlandaises de 2005, reproduites par Charlie, le dessin qui tue (qui tue le dessinateur) c'est celui qui dessine le "Prophète" - quelque peu divinisé par les musulmans d'aujourd'hui -, et donc devient un piège, éventuellement mortel. C'est pain bénit pour le tueur islamiste quand le dessinateur lui offre sur un plateau, précédant sa propre tête, une énième caricature du "Prophète". On peut espérer que la cause sera enfin entendue, et que les plus mordantes caricatures, issues du crayon des survivants, sauront éluder le visage de l'homme invisible qui est au ressort de l'islam et - jusqu'à preuve du contraire -, de l'islamisme?


















vendredi 23 janvier 2015

CYGNUS SANCTUS SPIRITUS

                                           

Nous sommes heureux de présenter ici un document majeur, tout récemment arraché aux profondes caves  du Vatican, suite à l'audacieuse opération d'un garde-suisse stipendié, semble-t-il, par un collectionneur libanais agissant lui-même comme go-between d'un armateur grec ou d'un oligarque russe ou d'un trader de la City ou d'un partner de Goldman Sachs. L'Église de Rome a de quoi se faire du mouron si l'exégèse prévaut selon laquelle cette scène, loin d'agréablement illustrer quelque facétie mythologique,  renverrait à l'un des moments-clé de la fable évangélique : ceux de nos lecteurs qu'un indifférentisme atavique, une inclination matérialiste, une sordide dévotion laïque ou quelque autre maladie de l'âme n'ont pas rendu sourds et aveugles aux mystères de notre sainte religion, auront déjà eu soupçon qu'en cette jeune personne pâmée, offerte dans le plus simple appareil au bel oiseau blanc, il se pourrait que nous dussions, bon gré mal gré, identifier la légendaire Marie qui "craque", si l'on nous permet ce mot, pour un certain "Gabriel", ange ou archange (on dispute sur son grade) expressément dépêché de là haut pour articuler la fameuse "annonciation" (Ave Maria gratia plena), et qui - secrète phase II de sa mission sacrée -, par l'effet d'une miraculeuse mue vient à l'instant, déposant son statut angélique asexué, de revêtir la majestueuse forme, non pas de la colombe - que pourrait un oiseau si petit? -, mais du cygne Saint-Esprit : du splendide Cygne immaculé qui sous les yeux écarquillés, peut-être, du chaste fiancé Joseph, embusqué dans les fourrés et résigné à cette union, toutes ailes battantes et frémissantes va incessamment besogner la peu farouche vierge, puisque Dieu le veut pour que dans neuf mois, etc. etc.








jeudi 22 janvier 2015

LA CELLULE


Non seulement cette famille de convertis vient de se constituer en cellule djihadiste, mais elle est si fière de son nouvel état (islamique) qu'à peine équipée elle s'est hâtée de poster sur sa page Facebook cette photo où nous voyons le trio poser en majesté. Une imprudence qui aura permis au GIPN de localiser les apprentis terroristes dans une ferme isolée du Cantal. L'assaut serait imminent. Marguerite, la matriarche, la tête et l'âme du trio, qui a pris le nom de guerre de Khadija, la première épouse du Prophète Muhammad, est entourée de son fils et de sa fille, ou de son fils et de sa bru, ou de sa fille et de son gendre, le doute persiste sur la nature exacte de la constellation familiale. Même, à en croire BFM TV, ces deux personnages seraient en réalité les deux ouvriers agricoles de Marguerite-Khadija, une thèse assez proche de celle soutenue par I-Télé, l'autre chaîne d'infos en continu, pour qui l'on aurait plutôt affaire, avec ces deux-là, à l'assistante de vie de Khadija-Marguerite et à son homme de peine, pompeusement  élevé par FR3 à la dignité de "majordome". Il n'est pas impossible, pour Canal +, que Marguerite-Khadija ait enrôlé les deux salariés sous la bannière de Daesh ou d'Al-Quaida, ou d'une filiale indéterminée, en leur laissant entendre que leurs CDD pourraient devenir des CDI, alors qu'ils s'apprêtaient, d'après TF1, à quitter la ferme dans l'idée de postuler au RSA. Nous croyons savoir, par notre source au ministère de l'Intérieur, que le négociateur du GIPN viserait à convaincre ces deux éléments de la "cellule" de livrer leur patronne aux forces de l'ordre, avec promesse, en échange de leur propre reddition, que la justice leur sera clémente, surtout s'il s'avérait que l'arsenal complaisamment exhibé ne se composait que d'armes factices, et qu'en matière de document suspect l'on ne trouvait, dans un tiroir, entre deux feuillets d'un calendrier de la Poste, qu'un papier déjà jauni portant pour tout message, gribouillé d'une main tremblante : "Cantal, lève-toi!", et pas la moindre trace d'aucune espèce de rhétorique fondamentaliste ni de meurtrière idéologie.









mercredi 21 janvier 2015

LAPINS CRÉTINS

               
                                             


                                        "Certains croient que, 
                                       passez-moi l'expression, 
                                  pour être de bons catholiques 
                              ils doivent être comme des lapins."
C'est le dernier bon mot du très populaire pape François dans l'avion, donc plus près du Ciel (1), qui le ramenait de Manille où le show de sa grand-messe aurait rassemblé, selon les organisateurs, 6 millions d'enthousiastes  (2)  - du grec "en" (en) et "theos" (dieu)  -,  2 millions de plus que nos marches du 11 janvier ! Le lapinisme est un humanisme, la bombe démographique - un peu tard pour en stopper la déflagration -  doit beaucoup à ces messieurs du Vatican, confits dans leur chaste célibat ou Tartuffes menant sous cape "une vie souvent dissolue", comme vient de les invectiver leur Souverain Pontife, s'adressant à la Curie Romaine. La population des archi-catholiques Philippines pourrait presque doubler d'ici cinquante ans. Rassurons-nous, ça devrait continuer de pareillement performer dans ceux des pays d'Afrique où le Vatican a dans ses bergeries de vastes troupeaux, dès lors qu'insoucieux de toute logique le pape a fermement réitéré, après avoir raillé les lapins, l'immémoriale condamnation de toute contraception "artificielle" : préservatif, pilule, D.I.U. (Dieu n'aime pas le D.I.U.), renvoyant ses ouailles à la contraception "naturelle" (éloge de la nature par les adeptes du surnaturel), théologiquement correcte et d'une efficace on ne peut plus douteuse. Pie XII autorisa et vanta en son temps la "continence périodique" via la fameuse méthode Ogino : "Ogino ergo sum", pourraient s'exclamer ses natifs reconnaissants. Et nous renverrons le papal François à la phrase fameuse d'une gloire de son Église, évêque de Condom (!) puis de Meaux,  prédicateur officiel de la cour,  grand expert en oraisons funèbres, Jacques Bénigne Bossuet : "Dieu se rit de ceux qui déplorent les effets dont ils continuent de chérir les causes."

(1) Géronimots 24 décembre 2014 Aggiornamento
(2) Géronimots  7 janvier 2015  Jour noir























mardi 20 janvier 2015

VOX CLAMANS


Cet homme a entrepris de haranguer ses contemporains, et pour ce faire il a jugé bon de se jucher au faîte d'une colonne, assuré de la sorte d'être visible de loin, et d'une plus grande portée de sa parole. Mais il n'est pas impossible, sans qu'il s'en doute en rien, que la colonne esseulée qui l'exhausse soit le reliquat d'un gigantesque temple, très ancien, où les colonnes succédaient aux colonnes, les portiques aux portiques, presque à l'infini, avant que des vicissitudes ignorées de nous n'eussent finalement eu raison de l'immense édifice : et ne subsista plus, sur le sol désolé et pelé qui de toutes parts l'environne, que la colonne unique dont sauf à quitter les lieux - pour aller où ? - notre orateur aura bien dû se contenter ... Encore n'est-il pas tout à fait exclu que cette parole dont il croit - qui ne le croirait à sa place? - qu'elle n'est issue que de l'isthme étroit de son gosier, procède en vérité d'une bien plus lointaine source, comme si du temple immense aboli continuait d'émaner, comme jadis du bosquet sacré de Dodone, tout un grand bruissement de voix, à charge pour notre homme, qui osa se percher tout là-haut, d'en répercuter le babil avec assez de force pour le faire atteindre aux extrémités de l'univers, ou du moins, roulant sous le ciel bas qui menace de l'étouffer, jusqu'aux vagues contreforts montagneux qui se dessinent à l'horizon.











lundi 19 janvier 2015

LE GISANT

                                     

                                             
Wolinski, on le sait, aimait les femmes, ses dessins n'avaient de cesse de leur rendre les hommages les plus inspirés : il était donc juste et naturel que même post mortem elles eussent moyen de répondre à cette dévotion dont le crayon de  l'artiste avait fait, de leur corps charmant, le troublant objet. A cette fin, si légitime, la République reconnaissante a déjà mis en place au cimetière du Monparnasse, sur la tombe du grand dessinateur assassiné, son superbe gisant  de bronze, et déjà ses amantes posthumes viennent  se recueillir sur sa tombe. Ainsi cette dame, qui lasse  d'errer de kiosque en kiosque dans l'espérance d'y trouver un introuvable Charlie, aura été la première, au dire des paparazzi présents sur le site, à rallier le lieu d'un pèlerinage qui, fût-il non-mixte, pourrait battre les records établis par la tombe d'un Jim Morrison au cimetière du Père-Lachaise. On saura gré à notre aimable pionnière d'avoir su exprimer sa ferveur sans se départir entièrement de la pudeur qui sied à son sexe ; et l'on notera l'élégance aristocratique, un rien désuète, du chapeau haut de forme, chu du chef du publiciste, assez solidement scellé sur sa tombe pour servir, si besoin, de cale-pied à ses amoureuses, et de réceptacle utile à l'accueil des fleurs, billets doux, petits billets de 5 ou 10 euros, non pour rémunérer l'étreinte, mais pour aider à vivre Charlie ... s'il ne se fait pas hara-kiri faute d'abjurer son dogme, même gravé dans le marbre, de la très sainte irresponsabilité.















dimanche 18 janvier 2015

COSI FAN TUTTE


                                                       

Dans sa toute nouvelle encyclique-choc : Cosi Fan Tutte, encore impubliée, mais dont le texte court les corridors ténébreux du Vatican, le pape François jette un regard désabusé sur la féminine engeance. Évoquant « l’éternel combat physique » (sic) entre Ève et Marie, entre la Pècheresse et la Madone, le Saint Père s'enhardit à une saisissante image où il nous montre "celle-ci à deux doigts d'être terrassée par celle-là, se débattant, gigotant sous elle, embarrassée, à l'encontre de sa rivale glorieusement nue, par l’appareil immaculé de ses voiles, ruant désespérément des bras et des jambes et puis se laissant aller avec des frissons de volupté tandis que la nuit, pudique ou complice, dérobe la scène à nos regards." Ce passage, surtout, de Cosi Fan Tutte, que nous livrons en exclusivité et non-caviardé, divise la Curie romaine. Quelques prélats, sans se prononcer nettement sur le fond, ne seraient pas insensibles à la poésie de cet inquiétant avatar féminin de la lutte de Jacob avec l'Ange, Genèse 32  23-32. D'autres, plus nombreux,  ne décolèrent pas, allant jusqu'à prononcer ou plutôt murmurer les mots encore inconnus en ces lieux de "destitution" du Souverain Pontife pour crime d'hérésie, suivie ou précédée d'une "excommunication majeure" ... Nous ne manquerons pas de tenir nos lecteurs informés de tous les développements même les plus secrets de l'affaire Cosi Fan Tutte, possiblement grosse d'un schisme comme l'Église en connut par le passé?

samedi 17 janvier 2015

.org

                                                                         


Sans doute aura-ton déjà reconnu, sur ce document tout récemment déclassifié, issu des archives du Musée de l'Air et de l'Espace, sur cette  photo  unique et si longtemps ultra-secrète, tout simplement et tout bonnement le glorieux supersonique franco-britannique au nom connu de tous, dont le tragique crash du 25 juillet 2000 brisa net la carrière. Cette étonnante image nous montre un moment-clé de son tout premier vol d'essai stratosphérique et supersonique, non sans jeter un jour quelque peu inquiétant sur les déformations de structure dont le bel engin pouvait être l'objet : on observera, notamment, les gonflements suspects du fuselage qui, au-dessous des ailes de géant de cet aéronef à nul autre pareil, semble littéralement se dédoubler, par l'effet d'une impressionnante turgescence suggérant que son élasticité est aux limites de la rupture … Et tel doit être, au vu du rougeoiement général, l'échauffement de toute la structure, que la perspective d’un embrasement imminent ne nous paraîtrait pas incrédible. Nous irions même jusqu’à soupçonner que, nouvel Icare, le pilote d’essai aurait bien pu, ce jour-là, ce premier jour, emporté par son enthousiasme, pousser les puissants moteurs bien au-delà du raisonnable, et la supposée vitesse maxi de Mach 2,3  dut lui sembler dérisoire, quitte à risquer, tant pis,  l'explosion en vol? Quant à l'altitude, nul doute qu'elle dépassait et de beaucoup les 20.025 mètres du plafond officiel … L'étonnant, pour ne pas dire l'inouï, c'est que l'appareil ait pu réchapper sans aucune séquelle d'une telle épreuve initiatique. Et nous nous prenons à rêver si nous considérons, quitte à pédagogiquement simplifier le tableau de bord, que l’hubris de ce premier vol n’aura requis que de presser d’un doigt un bouton et ce fut l’irrésistible essor, allegro, allegrissimo, crescendo, accelerando, prestissimo, fortissimo, altissimo, toute la magnifique carcasse vibrait, tremblait, rougeoyait et montait au troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième ciel, jusqu'à d'inimaginables empyrées et ... : mais c'est à nos lecteurs ou nos lectrices de poursuivre une évocation qui excède à ce point les faibles pouvoirs de notre plume. 


















vendredi 16 janvier 2015

HOUELLEBECQUISTAN



Le 7 janvier, jour noir, celui du massacre en conférence de rédaction, redoublé deux jours plus tard, deuxième jour sinistre, par un massacre antisémite dans le genre nazi, Charlie Hebdo  faisait les honneurs  caricaturaux de sa une au prophète national Michel, nouveau Victor Hugo que le monde nous envie. On sait que l'islam interdit aux musulmans de représenter leur Prophète, et que même pour les non-musulmans il ne fait pas trop bon s'y risquer, encore moins dans une caricature. Mais puisque de livre en livre Michel va vaticinant, et qu'il annonce et prophétise pour la France soumise de 2022 un régime islamique doux, fraternel, modéré, ne devrait-il pas bénéficier lui aussi, par décret de la République, d'un interdit de représentation ? A nous de le porter dans nos coeurs, d'invoquer son nom sacré et d'oublier, tant pis, l'image de sa Sainte Face. 


                                      

jeudi 15 janvier 2015

LÉVITIQUE & CIE

  


Tous les monothéismes ont leurs intégristes, adeptes d'une lecture littérale, an-historique, atemporelle et forcenée du Livre, comme si chacun de ses feuillets était estampillé voire filigrané par le Dieu dont il est censé procéder directement : buisson ardent, révélation chrétienne, dictée au Prophète. Par un singulier paradoxe, notons-le en passant, le pays le plus  "moderne" voire le plus matérialiste est aussi celui où à tout bout de champ et jusque dans les films de cul on s'écrie : O My God! , où le Président prête serment sur la Bible, où à même le dollar, ainsi sacralisé, s'affiche le In God We Trust, devise nationale : tout l'envers, donc, de notre "laïcité" française - dont le prophète Michel nous dit qu'elle est "morte" -,  même si la France a gardé son titre de "Fille aînée de l'Église" (Notre Sainte Mère l'Église), depuis que l'ultramontain y a maté le gallican, et même si chacun de nos successifs Présidents porte le titre assez kitsch de Chanoine de Latran, de, soyons précis : Premier chanoine de l'archibasilique de Saint-Jean-du-Latran, dont l'architartuffe Sarkozy était fier comme Artaban.
   On trouvera ci-dessous un texte très drôle, tiré non pas d'une oeuvre de Voltaire, mais d'une série TV sur NBC : The West Wing  - en français : A la Maison Blanche. Succédant à l'Exode, le Lévitique, tome 3 du Pentateuque ou de la Torah, est un minutieux recueil de ce qu'il faut faire et ne pas faire, même si de nos jours les lois d'Israël ou de tout autre État moderne proscrivent, évidemment, ce qu'en terre musulmane prescrivent encore et toujours, et plus que jamais,  les théocratiques pétromonarchies, qui ont engendré les monstres nommés Daech et Al-Quaïda.
  


      Dans l'une de ses émissions, une célèbre animatrice radio états-unienne faisait remarquer que l’homosexualité est une perversion : "C’est ce que dit la Bible dans le livre du Lévitique,   18  22 : "Tu ne coucheras pas avec un homme comme on couche avec une femme : ce serait une abomination".  "La Bible le dit. Un point c’est tout", affirma-t-elle. 

     Quelques jours plus tard, un auditeur lui adressa une lettre ouverte qui disait : 
   "Merci de mettre autant de ferveur à éduquer les gens à la Loi de Dieu. J’apprends beaucoup à l’écoute de votre programme et j’essaie d’en faire profiter tout le monde. Mais j’aurais besoin de conseils quant à d’autres lois bibliques. 
       Par exemple, je souhaiterais vendre ma fille comme servante, comme mentionné dans le livre de l’Exode, 21  7. A votre avis, quel serait le meilleur prix ?
       Le Lévitique aussi,  25  44, enseigne que je peux posséder des esclaves, hommes ou femmes, à condition qu’ils soient achetés dans des nations voisines. Un ami me dit que ceci est applicable aux Mexicains, mais pas aux Canadiens. Pourriez-vous m’éclairer sur ce point ? Pourquoi est-ce que je ne pourrais pas posséder d'esclaves canadiens ?
      J’ai un voisin qui tient à travailler le samedi. L’Exode, 35  2, dit clairement qu’il doit être condamné à mort. Suis-je obligé de le tuer moi-même ? Pourriez-vous me soulager de cette question gênante d’une quelconque manière ?
      Autre chose : le Lévitique,  21  18, dit qu’on ne peut pas s’approcher de l’autel de Dieu si on a des problèmes de vue. J’ai besoin de lunettes pour lire. Mon acuité visuelle doit-elle être de 100% ? Serait-il possible de revoir cette exigence à la baisse ?
     Un de mes amis pense que, même si c’est abominable de manger des fruits de mer (Lévitique 11 10), l’homosexualité est encore plus abominable. Je ne suis pas d’accord. Pouvez-vous régler notre différend ?
    La plupart de mes amis de sexe masculin se font couper les cheveux, y compris autour des tempes, alors que c’est expressément interdit par Le Lévitique (19  27). Comment doivent-ils mourir ?
      Je sais que l’on ne me permet aucun contact avec une femme tant qu’elle est dans sa période de règles (Lévitique. 15 19-24). Comment le savoir ? J’ai voulu le demander, mais la plupart des femmes s’en offusquent…
     Quand je brûle un taureau sur l’autel du sacrifice, je sais que l’odeur qui se dégage est apaisante pour le Seigneur (Levitique. 1 9). Le problème, c’est mes voisins : ils trouvent que cette odeur n’est pas apaisante pour eux. Dois-je les châtier en les frappant ?
     Un dernier conseil. Mon oncle ne respecte pas ce que dit le Lévitique 19 19, en plantant deux types de culture différents dans le même champ, et pareil pour sa femme qui porte des vêtements faits de différents tissus, coton et polyester. De plus, il passe ses journées à médire et à blasphémer. Est-il nécessaire d’aller jusqu’au bout de la procédure embarrassante consistant à réunir tous les habitants du village pour lapider mon oncle et ma tante, comme le prescrit le Lévitique,  24  10- 16 ? On ne pourrait pas plutôt les brûler vifs au cours d’une simple réunion familiale privée, comme ça se fait avec ceux qui couchent avec des parents proches, tel qu’il est indiqué dans le livre sacré,  20 14 ?
     Je sais que vous avez étudié à fond tous ces cas, aussi ai-je confiance en votre aide.
       Merci encore de nous rappeler que la loi de Dieu est éternelle et inaltérable.
           Votre disciple dévoué et fan admiratif."

mercredi 14 janvier 2015

UNION


Visiblement inspirés (ou les inspirant?) par des organes de presse consensuels et conviviaux tels que celui-ci, au titre, avouons-le, bizarre, on peut voir depuis dimanche dernier, un peu partout dans le pays, et bien trop impatients pour attendre ... octobre (!), nombre de jeunes gens de toutes conditions littéralement se jeter dans les bras d'un fonctionnaire de police qui, peut-être, n'en demandait pas tant, mais dans le contexte actuel ne saurait se soustraire à ces étreintes assez passionnées pour durer plusieurs minutes et même, quelquefois, nous en fûmes témoin, ne trouver leur dénouement qu'après que le couple inopiné aura roulé sur le gazon d'un square ou se sera emmêlé sur un banc public. Certains de nos jeunes gens y auront si bien pris goût que vous les verrez, un quart d'heure plus tard, dans les bras d'un autre agent, puis d'un autre, et d'un autre, adeptes d'un libertinage d'un genre jusqu'alors inconnu, quand à l'inverse ils sont des dizaines de couples, formés eux aussi de la tendre union d'un jeune  -  étudiant, apprenti, travailleur, chômeur - , et d'un membre des forces de l'ordre  -  gardien de la paix, CRS, RAID  - , déjà assez sûrs de la force de leurs liens pour se présenter en mairie à des fins de mariage. Sans avoir officiellement pris position, il semble que les autorités ne regardent pas d'un si mauvais oeil ce tout nouveau phénomène sociétal, avatar imprévu de ce mariage pour tous qui sema, naguère, quelque zizanie sur le territoire. Même, le chef de l'État songerait à recevoir à l'Élysée quelques uns de ces couples, pour une accolade scellant et consacrant d'un seul mouvement une union double, conjugale et nationale.


















mardi 13 janvier 2015

ABSENTHÉISME ATHÉIÈRE

                                 
En attendant Godot, par le Théâtre NoNo, Marseille
                                                   

ABSENTHÉISME : non-présence de la déité.
Depuis qu'ils l'attendaient, qu'ils ne faisaient que l'attendre, labsenthéisme de Godot commençait à déprimer les deux compères. Mais les eût-il vraiment ravigotés si, écartant tant bien que mal deux gros nuages, ou  se débrouillant pour forer un trou dans le ciel bleu, le vieux bougre eût enfin consenti à leur montrer sa tronche, probablement fort décatie, eu égard aux vicissitudes et autres avanies, depuis tout ce temps que ses tenants l’avaient mis en piste!

ATHÉIÈRE  Vase consacré mais vide de ce qu'il est censé contenir.
 Soudain le vieux curé, qui en plus d'un demi-siècle d'exercice n'avait pas une seule fois été effleuré d'un doute quant à la véracité des croyances dont on l'avait repu au  séminaire, eut un violent sursaut, penché sur l'athéière ternie, aux motifs usés, venant à l'instant d'embrasser la croyance contraire : la fameuse transsubstantiation, unique objet de toutes ses manipulations et formulations liturgiques, ne s'était jamais produite, il n'y avait dans le réceptacle que de minces disques insipides de pain azyme,  prétentieusement baptisés "hosties" ... : et, morose, il se mit à les bâfrer, tout en se disant que ça ne tenait pas au corps et que, dès demain, en dépit de son âge, il irait à Pôle Emploi aux fins d'entrer en apprentissage dans une pâtisserie, pour s'y pourlécher en confectionnant avec amour des pets-de-nonne et des religieuses.







lundi 12 janvier 2015

VLADIMIR ET JOSEPH


Les célébrations d'un mariage pour tous donnent souvent lieu à de superbes cérémonies, comme en témoigne ce cliché tout empreint d'une profonde émotion.  Leurs très nombreux amis ont poussé en choeur la chansonnette pour réjouir Vladimir et Joseph, les nouveaux mariés de l’An II du mariage universel ! La joie se lit sur le visage des deux conjoints, tournés vers l’avenir ils songent déjà au bonheur tranquille du foyer, à la longue suite sereine des jours. Mais nous devinons leur détermination farouche : ils ne laisseront pas les ultra-réactionnaires, s'ils venaient à s'emparer du pouvoir, détruire par une loi scélérate les acquis précieux d’une juste lutte enfin validée par le vote des représentants du peuple ! Tous leurs amis, aujourd’hui réunis pour fêter ce merveilleux mariage, seront alors avec eux, déjà disposés à faire largement couler le sang des factions fascisantes qui voudrait rompre la douce union des deux époux. En parade aux dangers futurs, rejoignons dès aujourd’hui nos chers Vladimir et Joseph ! Envoyons leur nos vœux de bonheur, jurons que nous serons et resterons les valeureux défenseurs de leur magnifique couple !

dimanche 11 janvier 2015

JE SUIS CHARLIT

                                                         
                                                     
Au soir de cette magnifique manifestation ramifiée dans toute la France, et en Europe, et même plus loin, retrouvons l'ironie voltairienne, qui est à la source et à la pointe de l'esprit français. Autant Rousseau, en vrai Tartuffe et/ou en profond névrosé, aura pu sombrer dans une obscène bêtise obscurantiste : "Je hais les livres", "la lecture est le fléau de l'enfance" - lui qui est devenu célèbre par ses livres ! -, autant Voltaire n'aura jamais cessé de faire l'éloge de la lecture, comme dans ce texte où il feint de la dénoncer, et de déplorer l'invention qui la démocratise : l'imprimerie. Se retrancher dans une ... imprimerie, à Dammartin-en-Goële, aura été fatal, c'est normal, aux frères Kouachi, les deux tueurs du voltairien, et rabelaisien, Charlie-Hebdo
      Ici Voltaire vise prioritairement et explicitement un obscurantisme d'obédience musulmane dans une variante ottomane qui, avec Erdogan, revient en Turquie, comme ailleurs, au goût du jour. Une exacte application de cet obscurantisme, que nous ne dirons pas musulman, mais islamiste, c'est aujourd'hui la secte terroriste Boko-Haram ("Haram" versus "Halal"), que l'on traduit par : "l'éducation occidentale est un péché". De même, naguère, la prétendue Révolution culturelle c'est-à-dire anti-culturelle du président Mao, visait-elle à détruire tout l'héritage lettré chinois (et physiquement les lettrés, au mieux à les "rééduquer"), avec l'approbation  enthousiaste des leaders intellectuels français des seventies, dont l'inévitable Sartre : ou comment une certaine intelligence, ou plutôt brillance,  jointe au désir de croire (libido credendi, dirons-nous) et de dominer (libido dominandi), et au total déni de la réalité (ces gens-là ne voulaient rien savoir de la Chine réelle, que dévoilait le grand sinologue Simon Leys), promet et promeut l'exercice triomphant et savant de la bêtise : le petit livre rouge, ou la rougeur de la honte qui aurait dû monter au front de ses thuriféraires. 
   Les grandes religions du Livre (Bible ou Coran) offrent ce danger ou ce risque de substituer à l'immense pluralité des livres, l'unicité et la sacralité du Livre, avec à la clé, par exemple, l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie (et tout récemment, dans certaines de nos banlieues, de quelques écoles et bibliothèques) ou, plus tard, l'ubuesque invention vaticane de l'Index librorum probibitorum. L'alternative extrême étant : l'interdiction de tous les livres (Fahrenheit 451, Joussouf-Chéribi)  /  l'obligation d'UN livre puisqu'il est LE Livre.

                      
                 Voltaire  De l'horrible danger de la lecture (1765)

Nous Joussouf-Chéribi, par la grâce de Dieu mouphti du Saint-Empire ottoman, lumière des lumières, élu entre les élus, à tous les fidèles qui ces présentes verront, sottise et bénédiction.

Comme ainsi soit que Saïd-Effendi, ci-devant ambassadeur de la Sublime-Porte vers un petit État nommé Frankrom, situé entre l’Espagne et l’Italie, a rapporté parmi nous le pernicieux usage de l’imprimerie, ayant consulté sur cette nouveauté nos vénérables frères les cadis et imans de la ville impériale de Stamboul, et surtout les fakirs connus par leur zèle contre l’esprit, il a semblé bon à Mahomet et à nous de condamner, proscrire, anathématiser ladite infernale invention de l’imprimerie, pour les causes ci-dessous énoncées.

1° Cette facilité de communiquer ses pensées tend évidemment à dissiper l’ignorance, qui est la gardienne et la sauvegarde des États bien policés.

2° Il est à craindre que, parmi les livres apportés d’Occident, il ne s’en trouve quelques-uns sur l’agriculture et sur les moyens de perfectionner les arts mécaniques, lesquels ouvrages pourraient à la longue, ce qu’à Dieu ne plaise, réveiller le génie de nos cultivateurs et de nos manufacturiers, exciter leur industrie, augmenter leurs richesses, et leur inspirer un jour quelque élévation d’âme, quelque amour du bien public, sentiments absolument opposés à la saine doctrine.

3° Il arriverait à la fin que nous aurions des livres d’histoire dégagés du merveilleux qui entretient la nation dans une heureuse stupidité. On aurait dans ces livres l’imprudence de rendre justice aux bonnes et aux mauvaises actions, et de recommander l’équité et l’amour de la patrie, ce qui est visiblement contraire aux droits de notre place.

4° Il se pourrait, dans la suite des temps, que de misérables philosophes, sous le prétexte spécieux, mais punissable, d’éclairer les hommes et de les rendre meilleurs, viendraient nous enseigner des vertus dangereuses dont le peuple ne doit jamais avoir de connaissance.

5° Ils pourraient, en augmentant le respect qu’ils ont pour Dieu, et en imprimant scandaleusement qu’il remplit tout de sa présence, diminuer le nombre des pèlerins de la Mecque, au grand détriment du salut des âmes.

6° Il arriverait sans doute qu’à force de lire les auteurs occidentaux qui ont traité des maladies contagieuses, et de la manière de les prévenir, nous serions assez malheureux pour nous garantir de la peste, ce qui serait un attentat énorme contre les ordres de la Providence.

A ces causes et autres, pour l’édification des fidèles et pour le bien de leurs âmes, nous leur défendons de jamais lire aucun livre, sous peine de damnation éternelle. Et, de peur que la tentation diabolique ne leur prenne de s’instruire, nous défendons aux pères et aux mères d’enseigner à lire à leurs enfants. Et, pour prévenir toute contravention à notre ordonnance, nous leur défendons expressément de penser, sous les mêmes peines; enjoignons à tous les vrais croyants de dénoncer à notre officialité quiconque aurait prononcé quatre phrases liées ensemble, desquelles on pourrait inférer un sens clair et net. Ordonnons que dans toutes les conversations on ait à se servir de termes qui ne signifient rien, selon l’ancien usage de la Sublime-Porte.

Et pour empêcher qu’il n’entre quelque pensée en contrebande dans la sacrée ville impériale, commettons spécialement le premier médecin de Sa Hautesse, né dans un marais de l’Occident septentrional; lequel médecin, ayant déjà tué quatre personnes augustes de la famille ottomane, est intéressé plus que personne à prévenir toute introduction de connaissances dans le pays; lui donnons pouvoir, par ces présentes, de faire saisir toute idée qui se présenterait par écrit ou de bouche aux portes de la ville, et nous amener ladite idée pieds et poings liés, pour lui être infligé par nous tel châtiment qu’il nous plaira.

Donné dans notre palais de la stupidité, le 7 de la lune de Muharem, l’an 1143 de l’hégire.


samedi 10 janvier 2015

LE QATAR ENCHAÎNÉ

                                     

                                                    
                LE CANARD ENCHAÎNÉ RENAÎT SOUS LE TITRE 
                                 LE QATAR ENCHAÎNÉ
                        


« Que notre lectorat se rassure, nous déclare dans un entretien exclusif le chief-manager de la publication, ce changement de titre et de propriétaire n'a rien à voir avec aucune forme de, comment dirais-je, le mot m'échappe, ah : soumission, soumission. Adaptation serait le mot juste pour désigner le process évolutif. Nous ne perdrons pas notre mordant, mais nous aurons à cœur de mettre l’accent sur des questions que le positionnement parfois désuet du Canard nous prohibait. Les femmes, par exemple, prenons les femmes, n'y a-t-il pas urgence à dénoncer cette injonction qui leur est faite d’aller à visage découvert? Leur épiderme est fragile, la surexposition lui nuit. Le Qatar enchaîné soutiendra les luttes du MLF, le Mouvement de Localisation des Femmes : le chef de famille doit savoir à tout moment où sont ses femmes, le danger est partout, le téléphone arabe ne suffit pas, elles auront à la cheville un coquet bracelet high-tech ad hoc. Il va de soi que Le Qatar enchaîné appuiera le combat des femmes pour leur liberté, comme celle d’être dénudées sur les plages, sous un voile approprié qui les recouvrira. La religion est une affaire importante : savez-vous, savions-nous nous-mêmes pourquoi le Canard bouffait du curé, comme on dit vulgairement ? C'était, ce ne pouvait être que pour frayer la voie à la voix de l'imam ... L’appel du muezzin traversera le tapage des cloches. Et le foot, n'oublions pas le foot, rien, presque rien n'est plus important que le foot. Le PSG allait à vau-l'eau, depuis son rachat il caracole. Demain il s’appellera le QSG, comme feu le Canard renaît dans le Qatar, transfiguré, colorisé, augmenté, 64 pages au lieu de 8 ! Mais avis à nos lecteurs : Le Qatar enchaîné, journal satirique, ne paraîtra pas le mercredi, comme le Canard, il sortira le vendredi, si vous voyez pourquoi."