Géronimots XXI

mardi 3 mars 2015

LE PATIENT


Cet individu rondouillard, aux airs débonnaires, est en réalité des plus dangereux : raison pourquoi, autorisé pour la toute première fois à faire un petit tour hors de l'établissement de soins, le voici encadré par deux infirmiers, suivi par deux psychiatres, et escorté par quatre gardiens en uniformes. On aura remarqué qu'au moins deux des membres du personnel ont un carnet et un stylo, de sorte à pouvoir consigner aussitôt les propos délirants qui  risquent à tout moment de sortir de la bouche du psychopathe. Nous avons eu connaissance de son dossier, qui témoigne d'une mythomanie et d'une mégalomanie sans faille : il se dit convaincu que le parc et les bâtiments indiqués sur le plan, dans son dos, tout a été fait par lui, pour lui, tout est de son ressort ; il croit, de même, qu'il a tout pouvoir sur l'ensemble du personnel, si ça lui chante ou s'il le juge bon il ordonnera à tel ou tel de tomber à genoux devant lui, de se jeter à l'eau pour lui, de lui rendre des services sexuels. Il ne sait pas qu'au moindre geste suspect, le solide infirmier qui marche à sa droite lui sautera dessus pour le stranguler, s'il n'a pas été devancé par l'un des quatre gardiens qui, dégainant son arme de service, lui tirera une balle en pleine tête, avant  même que l'un des deux psychiatres n'ait eu le temps de lui planter sa seringue pour le neutraliser. Et ne restera qu'à se débarrasser du corps, peut-être en l'inhumant sous l'immense panneau, tel une pierre tombale, pour qu'il ait le bonheur de reposer sous la représentation de son domaine.