Géronimots XXI

dimanche 13 mars 2016

SPRAY TO FORGET

Coup de tonnerre dans la galaxie proustienne! Une latte soulevée lors de travaux dans l'appartement qui fut, 102 boulevard Haussmann, celui du glorieux auteur de l'immense Recherche du temps perdu, et les ouvriers effarés découvraient plusieurs centaines de ces fioles, vides, de spray to forget ... Tous les proustiens savaient, bien sûr, que leur héros avait toujours été un consommateur forcené de maintes potions médicinales, mais de là à devoir s'aviser que le chercheur, le prospecteur, l'explorateur du Temps perdu n'avait de cesse, simultanément, de se gaver d'une molécule censée lui apporter l'oubli ... Les plus fameux experts de la chose proustienne en perdent leur latin ; les simples amateurs, a fortiori les passionnés, les enragés, s'en arrachent les cheveux. Et toutes ces bonnes gens, orbitant autour de l'astre unique, de songer que sans la  dissolvante molécule, sans le fatal spray, le Temps retrouvé à la pointe de sa plume par le maestro eût acquis des proportions encore plus fantastiques, et se fût  révélé, peut-être, d'une si inouïe densité que ce prodigieux gâteau eût eu de quoi les rassasier toujours davantage  -  à moins que tout au contraire, simples proustiens ou supposés grands maîtres, ils ne se fussent, dépités, cassé les dents sur un matériau infrangible, tournant autour de l'imprenable objet sans réussir à lui donner l'assaut?