LE VOL

Objet de la muette réprobation des passants, cette femme d'un certain âge n'a pu s'empêcher, en  longeant un kiosque, de faucher un quelconque journal qu'elle n'a pas encore eu le temps de planquer sous son imper. Le bonhomme aux airs assez louches qui marche à ses côtés est à l'évidence son complice, nul doute que le couple songe déjà à un autre mauvais coup, fût-il tout aussi dérisoire, rassurons-nous, voire absurde - vol d'un pot de moutarde ou de yaourt, d'un carambar, d'un crayon pour griffonner des bêtises - comme si les deux larrons ne savaient quoi faire pour s'occuper, quitte à causer de menus scandales et à se retrouver au poste l'espace d'un quart d'heure.

DÉMÉNAGEMENT

Jacques Géraud déménageant
            Son blog sera intermittent
                            Mais pas longtemps

CREATIVE WRITING

L'atelier d'écriture bat son plein, les apprentis font preuve d'une ardeur splendide, et d'autant plus méritoire que pour certains d'entre eux cela doit faire quelques décennies qu'ils s'évertuent à la confection de leur premier roman. Le directeur de l'atelier, debout près du bureau de l'animateur, est venu jeter un oeil sur un chapitre en gestation, work in progress mais si lent hélas dans ses avancées, quoique prometteuses, qu'il faudra encore dix ans, vingt ans, au doigt mouillé, comme celui qui tourne les pages, pour que puisse être donné le coup de tampon préalable à l'imprimatur. Et qui sait si d'ici là le chef de l'élève vieilli sous le littéraire harnais  ne sera pas tombé, avec un bruit de cliquetis, et pour n'en plus bouger, sur les touches de sa machine? N'importe, pourvu que vienne quelque autre horrible travailleur qui, tandis que le corps de son prédécesseur est traîné hors de l'arène, s'est déjà assis devant le clavier pour continuer l'oeuvre en cours, fût-elle interminable, tel un si grand rouleau qu'il aurait de quoi envelopper, momie pharaonique, le corps du tout dernier élève obstinément resté en piste sous le diminuant halo d'une expirante ampoule à peine suffisante à démêler l'imbroglio des signes sur le méchant papier jauni.

TRIÉ SUR LE VOLET

Ce dandy ne cache pas sa joie, qui vient de remporter la palme au fameux Concours d'Élégance Masculine de Montpouillan (Lot-et-Garonne), devant une bonne centaine de candidats montés de tout le département et des départements circonvoisins et de tout le grand Sud-Ouest. Et voici que notre homme  attend de pied ferme toutes les  jeunes vierges montpouillanaises, lot-et-garonnaises, et au-delà, autant de filles à marier qui ne vont pas manquer de se ruer en foule et en folie sur le nouveau prince des élégances, toutes déjà disposées à lui offrir illico leur fleur dont nous ne doutons pas qu'il saura la cueillir, de sorte à éclairer son choix entre tant de  prétendantes, à moins qu'apeuré par un pareil assaut il ne se retranche en catastrophe derrière les persiennes de sa belle maison bourgeoise, promptement refermées et verrouillées  par sa maman et sa grand-mère, duègnes qui ne le lâchent pas et sauront si besoin soutenir un siège dont nous ne manquerons pas de signaler les péripéties.

ADOPTÉ

Fier du devoir accompli, ce couple très alluré : chemise rose pour monsieur, sobre veste noire pour madame, pose avec gravité, encadrant le migrant qu'il vient généreusement d'adopter. Hier encore le pauvre homme vivait ou végétait sous cette grande tente rapiécée,  faite de méchants lambeaux de toile marron, et le voici entre ses deux bienfaiteurs, revêtu d'un vrai costume sans doute un peu chiffonné,  quelque peu étriqué, tout juste décroché du portemanteau triangulaire orange, mais largement suffisant à le réintégrer dans la communauté humaine. Une émotion bien compréhensible l'empêche de regarder vers l'objectif, il aura préféré  laisser flotter son regard dans une brume lointaine où il cherche les contours d'un avenir que nous lui souhaitons prometteur dans le sein de sa nouvelle patrie et d'une famille retrouvée.

HUIT DEBOUT

Il n'y a pas que Paris, il n'y a pas que la Place de la République, puisque plusieurs villages  bien de chez nous ont décidé de mettre sur pied leur propre Nuit Debout, qui devrait recevoir le modeste nom de baptême de Huit Debout : le contenu arithmétique de deux voitures qui, se déversant au crépuscule sur la Grand Place  ... : et les palabres de s'instaurer, les changements de paradigmes de battre leur plein, la Révolution de pointer son nez rouge derrière le clocher, et sur les trois heures du mat' un casseur, indispensable au casting des Huit Debout, de caillasser  la vitrine d'une boutique  du patelin.

AMORIS LAETITIA

(coproduction Géronimots / le Gérofi) 

Exhortation apostolique post-synodale, signée du fameux pape François, Amoris Laetitia, La joie de l'amour, cartonne dans les gondoles. Nonobstant  cet honnête aveu liminaire : "Personnellement je n'y connais rien", Sa Sainteté n'y va pas par quatre chemins quand Elle proclame que "Les trois portes du corps sacré de la femme ont vocation à s'ouvrir à l'homme", et ce d'autant plus que l'immémoriale injonction reproductrice en prend ici un sacré coup : "Il y a trop de monde sur cette planète. Dieu n'en demandait pas tant. Un milliard d'humains suffiraient largement à la joie divine." Un peu plus loin, sexologue improvisé, facétieux,  consolateur des porteurs de micropénis, le Saint Père n'hésite pas à  convoquer tel docteur de l'Église gribouillant, dans la marge de l'un de ces bons vieux Manuels des Confesseurs : "Venus certe cuis illa tremens". Nous laisserons à nos lecteurs le soin de traduire ce pieux adage, et ne pouvons que les inviter à se plonger, pour la somme modique de 6,90 €, dans cette joie pontificale de l'Amour.

EMMANUEL ET JEANNE

Le joli ministre Macron
S'en est allé voir Jeanne d'Arc
Aux fins de tirer les marrons
Du feu et de la fumée âcre.

DEUX BLONDES

Placée un peu par hasard, à la faveur d'une kermesse paroissiale, à côté d'une quadragénaire blonde, cette blonde catégorie junior, si elle braque sur son aînée un regard chargé de haine, c'est pour avoir pressenti, sur le visage alourdi, élargi, épaissi de sa voisine, le fatal devenir de son joli minois d'ici quelque vingt ans.

HÉLICOIDÉALEMENT

Via Fabrice Lefaix sur Facebook

15 août 2016!

Six mois déjà que les Nuits Debout agitent les médias, comme en atteste ce cliché qui nous montre la sempiternelle Place de la République au crépuscule, en plein mois d’août, encore et toujours occupée par une foule qui, eu égard à la météo, s’est autorisée à  se mettre à l’aise. Et si tous ces  gens, jamais las de palabrer, lèvent la tête, et dans l’incendie du couchant mettent la main en visière, c’est pour ne rien perdre de la bourdonnante approche de l'hélico affrété par l’Académie qui leur envoie en observateur, cette fois-ci aérien, le dernier Immortel élu par la confrérie, soi-même Finkie, le fameux philosophe, plus que jamais soucieux de prendre le pouls des adeptes, au risque des huées et autres avanies, avant d’aller dare-dare exprimer et disséminer son sentiment sur les stations, les sites et les chaînes.

NUS DEBOUT

En direct de la Place de La République 

Grosse fatigue chez les Nus Debout