On
nous signale que quelques centaines de messieurs d’âge mûr, vêtus d’une robe noire qui leur tombe jusqu'aux pieds, ceints d'une large et longue étoffe tantôt violette, tantôt pourpre, et coiffés d’un drôle de petit béret de
même couleur, se seraient hermétiquement enclos dans une manière de palais pour délibérer sur le chapitre de
la Famille. Chose extraordinaire, si
nous en croyons nos informateurs, aucun de ces messieurs en robe
n’a fondé de famille ; aucun d’entre eux n’est
marié ni ne vit maritalement, et tous ont fait le serment solennel, devant une figurine en bois ou en stuc qu'ils révèrent, où douloureusement s'accroche un homme jeune quasi nu, de ne jamais approcher intimement la Femme ! Or, ayant dûment et longuement délibéré dans la clôture de leur
palais, on nous dit qu’ils devraient légiférer sur ces choses pour eux si ténébreuses, avant de donner la parole à leur
représentant, vieillard sorti de leurs rangs, presque octogénaire, qui se
signale aux regards de s’envelopper d’une robe toute blanche. Nous avouerons
que nous avons peine à ajouter foi à des dires si étranges. Il s’agirait
plutôt, selon nous, considérant les tenues colorées de ces personnages, d’une sorte d’assemblée carnavalesque,
d’autant plus qu’ils ont avec eux, ou rôdant dans les couloirs, quelques dizaines de
jeunes hommes de haute taille, vêtus d’un costume bariolé de type médiéval, et
qui s’amusent à brandir des lances dont nous voulons croire qu'ils ne vont pas les en percer. Tout cela, rassurons-nous, devrait finir par des chansons à
boire, tout ce monde ressortira pompette et si d’aventure le vieux bonhomme en blanc
veut tout de même articuler, du haut des escaliers de marbre, quelques
mots bien sentis sur la Famille,
nous le verrons qui bafouille, s’étouffe, pouffe, et par contagion toute la
bande se gondole sur le parvis, comme pour signifier que cette affaire d’une assemblée prétendument en charge de magistralement traiter d’une
question qui lui est impénétrable, c’était une bonne blague.